Les anges gardiens
Modes et finalités d’une protection rapprochée par Philippe Faure
La fin du Moyen Âge est depuis longtemps considérée comme une période qui voit triompher la dévotion aux anges gardiens, alors même qu’il n’existe pas encore dans l’Église latine de fête spécifique des anges gardiens. Dans le calendrier liturgique, c’est la saint Michel d’automne (29 septembre) qui est jusqu’à la fin du Moyen Âge la fête de tous les anges. Jean Huizinga en son temps1, puis Raoul Manselli2 et plus récemment Jean Delumeau3, ont attiré l’attention des historiens sur ce point. Le premier estimait que le fidèle de la fin du Moyen Âge « sentait le besoin d’une présence plus spirituelle et d’une protection plus surnaturelle. En se portant sur l’ange gardien, à la figure à peine distincte, la piété retrouvait le contact avec le surnaturel et le mystère ». De son côté, Jean Delumeau a rejeté ce point de vue, en estimant que la dévotion aux saints et la dévotion aux anges gardiens se sont épaulées mutuellement, au sein d’un système général de sécurité spirituelle, dans un temps de crises et de fléaux.
2On se propose de reprendre ce dossier de la dévotion aux anges gardiens à la fin du Moyen Âge, en s’efforçant de définir en quoi elle est censée contribuer à une protection spirituelle, dans quelles circonstances et sous quelles formes. Les prières aux anges gardiens et leur iconographie, qui commence à s’affirmer au XIVe siècle, forment l’essentiel de nos sources documentaires, auxquelles on a ajouté quelques Vitae et récits de visions particulièrement significatives pour notre propos.....
Fig. 2. Heures de Jeanne de Navarre
Paris, BNF, ms n.a.l. 3145, fol. 123.